Ce recueil s’ouvre sur des images de détresse, et sur un dialogue insistant de soi à soi (le sous-titre de l’ouvrage est d’ailleurs « tu, sa vie, son œuvre ») :
«tu te bats te débats
dans la nuit qui te noie t’assiège te dissout ».
La soif d’identité est prête à subvertir le vieil homme:
«et tu voudrais vomir cela qui n’est pas toi ».
Elle entraîne un examen fasciné du corps, de toute la personne, un désarroi lucide qui oscille de la rage à l’autodérision :
« le rat devrait se chercher une ordure
plus appétissante que toi ».
……………………………
… « tu ne peux vivre
que sous l’écorce de la vie ».
Les vers martelés d’anaphores scandent la hantise et l’horreur d’un échec intime.
Le poète consent au torrent qui l’emporte, à une série d’abandons: abandon de la chose « vautrée au creux du monde / les quatre fers en l’air », de la parole qui « ne fait pas trois pas hors de ta bouche / qu’elle succombe », de soi, même: « ton dernier râle fait écho/ à ton premier vagissement ». Et pourtant:
« l’enfant que tu étais est un rire d’eau tendre».
Mais la litanie des échecs souligne le désir d’une vie fondée:
« tu voudrais
dessiner sur le mur la forme d’une destinée. »
©Gilles Lades