Ce recueil de 90 pages, Être au monde, s’ouvre sur un long poème, « Aube », dans lequel on retrouve avec un plaisir égal le style maîtrisé de Béatrice Libert où le matin qui « coule sur nos peaux » s’installe sur la terre.
la rémige du canal
la couleuvre du rail
la longue langue des chemins
la flèche de mon désir
et celle du poème qui pose son visage
contre celui du jour ».
Poète de la clarté et de la tendresse, poète femelle en ses élans, Béatrice Libert parle de l’enfance avec cette force féroce de louve où l’intime devient miel et où l’épiderme ploie sous la caresse.
Elle rassemble ici plusieurs textes publiés en revues ou en des fascicules. Ainsi « L’Heure blanche » fit l’objet d’une parution dans « Encres vives » (de Michel Cosem) et « Deux enfances » dans « Le Poémier de Plein Vent » (d’Annie Delpérier).
Si Béatrice Libert sait privilégier, dans ses poèmes, et l’amante et la femme, elle peut également donner à son rôle de mère des déclinaisons superbes.
ventre, le souvenir de tes frissons et de tes fièvres.
À ton tour, maintenant, de me porter en toi, dans tes
yeux, par ta voix… »
L’amour, chez Béatrice Libert, est une nécessité poétique qu’elle porte en elle et ne la quittera jamais.
Avec un nouveau petit livre, Alphabet blanc, Béatrice Libert brosse un tableau hivernal où la légèreté des flocons de neige rejoint la légèreté de style d’un poète inspiré pour qui les mots servent à gravir les marches d’un toujours possible bonheur. La poésie est du voyage et l’amour un laisser-passer.
pour que nos pas
n’entachent pas la neige ».
©Jean Chatard
Note de lecture in Les Hommes sans épaules, n° 19, premier semestre 2005.