Étrange livre, en vérité, tout en calicots de l’extrême, en graffiti de colère et en proliférations dérivées de l’inconscient, d’un baroque têtu dont l’imaginaire est le calice d’un surréalisme halluciné qui porte plainte contre toutes les circonstances de la société libérale. Cet engagement dopé au romantisme révolutionnaire fait aussi pulluler les gueules des grotesques et « les gargouilles au poing de fumée ». Les humiliés, les Incas, certaines figures mythologiques sont appelés à la rescousse pour débarrasser le monde des exploiteurs, dans une atmosphère de fin du monde. Le titre dit assez peu l’ambition du projet – une constellation. Le lecteur n’a d’autre ressource que de s’accrocher aux bastingages d’une nef en furie, cousine du Vaisseau fantôme, d’où Jack Küpfer fait couler l’archet d’une musique des grands fonds qu’on déshabille entre examen de conscience et « ultime champ de bataille de l’amour », ou bien d’allumer le feu de ses sources intérieures dans un boucan stellaire. Une préciosité truculente fait bouillir des cantates, remuer les gemmes d’un monde à l’agonie, flamber les alcools les moins tranquilles. Ici, état de liesse noire permanent. Et ça jubile sec sur les décombres de la civilisation, à l’image de ces témoins muets dont la présence est récurrente : les grotesques !
©Alain Breton
Note de lecture in revue Les Hommes sans Épaules, n° 33, 1er semestre 2012.