Cet ouvrage se déroule, se déploie, comme une saison de l’âme, avec peu d’objets, mais au loin la montagne, l’argile, l’acacia, le ruisseau ; suffisamment de poids pour se savoir être, et de formes pleines pour mesurer son vide.
L’épreuve, qui inflige un tourment insaisissable, oscille de l’absence (« le désert sans ses pas », « être de terre sans ciel ») à l’opacité (« la saison nous roulait dans ses jours pleins de nuit »).
Et l’on s’habitue à la déception, aux minces lumières qui nous sont retirées.
Mais, au hasard de la neige, « le pas de l’ange » est le premier indice. Puis « quelques mots dans le silence des jours » suivis de « la terre rouge », des « chênes verts », cette fois réellement vus, substantiellement traversés par le regard, inaugurent une purification qui est aussi un allègement.
Et l’on franchit « ce silence singulier qui est un seuil », cette interface entre ombre et lumière, silence et parole.
Jusqu’au moment où la contemplation paraît presque plus désirable que les mots, où l’émotion est si ténue, si verticale, que la vie s’éternise, à la manière de
« ce dimanche impérissable »,
ou de « quelques nuages légers comme des pensées ».
©Gilles Lades
in revue Friches, n° 83, été 2003.