Avec ce recueil, Alain Lacouchie taille plus que jamais dans le vif des mots : un personnage s’y dresse, « ensanglanté de sa lumière ».
À travers la fiction du « il », le poète avance sur les plaques mouvantes du destin, se heurte aux strates cruelles du monde et de ses propres désirs contradictoires :
« oscillant des pulsions en son autoportrait ».
La lucidité, l’auto-dérision (« renard plutôt que hérisson. Et visible, pourtant »), estompées sur fond de mémoire découragée, peuvent se muer, rageusement, en un baroque fuligineux :
« Il est chat noir au radoub de ses propres routes. »
Sans cesse la romance et la furie se juxtaposent, non sans quelque aveu de lassitude :
« Il en a assez d’abrasifs et se battre ».
Suffit-il au poète d’être le « dramaturge infime » des affres et des écroulements ? Pendant que persiste un rêve de Sud, que s’évapore « la femme d’encens ». Et que surgit la tentation, pour une poésie si âpre et si concrète, d’abolir le combat :
« Laissez-moi fuir l’attente jusqu’au silence ».
©Gilles Lades
in revue Friches, n° 66, printemps 1999.