La poésie de Jean Portante, cursive, inventive, brille de tous les feux de la créativité et son domaine, la langue, porte à l’incandescence une parole où la réalité, symbolisée par l’arbre, est vouée à la cendre, non parce qu’elle meurt mais parce qu’elle brûle. Et c’est là, semble-t-il, la force de Portante qui, certes, admet la fin de toutes choses mais en souligne le processus par l’incinération passionnelle et non par la simple décomposition chimique. Sans doute, le résultat demeure le même selon les concepts de l’Eglise, mais le poète assume ses élans, gouverne ses pulsions, sculpte en artiste la destinée de toutes les choses qui le concernent.
Il en résulte une poésie inspirée où la fragilité rejoint quelque part la création véritable, entre détresse et jubilation, entre maîtrise et rencontre fortuite.
Lionel Ray, dans la préface, évoque exubérance et fantaisie, errances visuelles et mentales, à propos de cette poésie originale entre toutes. Et, certes, elle est riche des multiples couleurs de l’inspiration, de la trouvaille insolite, mais elle possède également cette faculté, cette grâce, où l’interrogation allume des feux dans les ténèbres.
L’une des particularitéS de cette poésie est qu’elle sait cultiver l’angoisse du dernier vers qui, avant de sauter le pas, se mesure au néant de la page, de la marge. Tout semble finir et tout recommence, car la poésie de Jean Portante se renouvelle sans cesse ,en prenant force dans ce qui fut son élan.
« au-dessus de la ville
il a tendu un nord qui monte.
Où s’arrête le jeu d’ascension.
La corde rend le silence durable. »
Avec L’Arbre de la disparition, Jean Portante utilise du langage ses méandres et ses dons, ses escapades vers l’insolite et, s’il n’oublie pas le Surréalisme, il sait, avec maîtrise, s’en écarter, afin de créer un monde poétique à sa mesure.
©Jean Chatard
Note de lecture in Les Hommes sans épaules, n° 19, premier semestre 2005.